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Photo du rédacteurFrédéric Mathevet

Chants d’un dépossédé (II)

La chambre des messieurs_résidence sauvage juillet 2020

Galerie Huit, Arles_Août 2020


Lè map sele chwal mwen gen moun kap kriye! Lè map fout moute chwal mwen gen moun kap kriye !

Chant haïtien vaudou adressé à Damballah Wedo.


écusson de massacre, carte sonore bluetooth. Work in progress.

Les résidences sauvages ont pour vocation de fragiliser les systèmes de « majorité ». Briser les normes du standard, montrer et témoigner de l’atelier. Pour le dire avec Deleuze et Guattari (à propos de Kafka), la résidence sauvage comme dispositif économique fragile et précaire force à trouver son point de sous-développement, à ausculter son tiers monde à soi, pour se décoloniser.

Trouver le point de dépossession du sensible prêt-à-porter pour prendre possession à nouveau, au seuil d’un œil et d’une oreille sauvages. C’est à ce point précis que peut se questionner la fabrique de nos mondes.

« You blocked up my ears You plucked out my eyes You cut out my tongue You fed me with lies »

Song of the dispossessed, Dead Can Dance.

Recherche dessinée pour une partition autour des écussons de massacre.


La résidence sauvage est le lieu et le moment du combat et du déplacement. Une guérilla qui consiste à trouver son point de sous-développement, l’au-delà du langage, le soir de l’écriture (Malabou), où se plastique la norme.

« La puissance de minorité, de particularité, trouve sa figure ou sa conscience universelle dans le prolétaire. Mais, tant que la classe ouvrière se définit par un statut acquis, ou même par un État théoriquement conquis, elle apparaît seulement comme “capital”, partie du capital (capital variable), et ne sort pas du plan du capital. Tout au plus le plan devient-il bureaucratique. En revanche, c’est en sortant du plan du capital, en ne cessant pas d’en sortir, qu’une masse devient sans cesse révolutionnaire... »

Mille Plateaux, p. 589.


88 sculptures faites à la main, pour piano. Work in progress.

La résidence sauvage cherche le point de rupture d’avec le langage institutionnel (celui aussi qu’il faut apprendre à parler si l’on veut bien bénéficier d’un moyen de productions) et d’avec celui, conséquent du premier, plastique, dans le mauvais sens du terme, qui labellise, étiquette, formate l’art et la recherche en art et avec l’art. C’est à ce point aussi que la guérilla doit pouvoir se mener.

Le modèle des nouveaux commanditaires (Stengers, Latour), malgré tout l’intérêt que je lui porte et tout le potentiel alternatif qu’il pourrait charrier, laisse l’artiste être « au service de ». Une nouvelle fois en bout de chaîne, comme s’il n’était pas suffisamment dans le monde pour le comprendre et le questionner. Une fois de plus, il ne faut pas inverser les rôles. S’il veut continuer à écrire pour les analphabètes et pour les idiots, à la manière de l’écrivain public qui laisse disposer de sa compétence pour ceux qui ne l’ont pas, l'artiste doit revoir la notion de commande.

Parce que la commande est partout. Elle se formule d’elle-même, dans le sensible et dans l’urgence de sa rencontre et de sa fabrique.



La chambre des messieurs est et restera le lieu où je retournerais pour trouver mon patois singulier plastique sonore et musical. L’au-delà vernaculaire d’un sensible à faire et à refaire.

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